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Béton et construction durable – antagonisme ou réalité?

Ciments Calcia était présent au salon Batimat à la Porte de Versailles pour participer à une discussion autour du béton et de la construction durable. Sujet majeur de notre société, longtemps relayé au second plan. Un sujet qui nous permettra de repenser notre monde de demain. Comment notre industrie s'adapte à ces nouveaux enjeux ?

Les participants : 

• Fabrice Couste (animateur)
• Stéphane De L'Hommeau - Directeur Commercial France - Ciments Calcia

Résumé écrit de la discussion :

En matière de construction plus durable, la RE 2020 entrée en vigueur cette année vient renforcer les exigences environnementales de la construction, mais n’est-elle pas identique à la RT 2012? Décryptage

La nouvelle RE 2020 introduit des changements majeurs par rapport à la RE 2012 :

  • renforcement de la sobriété des bâtiments
  • prise en compte de l’empreinte environnementale des bâtiments
  • meilleure anticipation de l’inconfort d’été.

Là où la RT 2012 demandait le calcul de 3 indicateurs - le Bbio, le Cep et la Tic -, la RE 2020 impose d’en calculer 9, répartis en 5 indicateurs sur la performance énergétique et 4 indicateurs sur l’impact carbone des bâtiments.

Quelles sont les raisons pour lesquelles le béton est aujourd’hui le mauvais élève dans le panel des matériaux de construction ?

Effectivement, on tape beaucoup sur le béton, pourtant historiquement, à sa naissance il était davantage vu comme une bénédiction pour le secteur.

Certes, il faudra possiblement revenir à une utilisation plus optimale et raisonnée mais c’est un matériau évolutif et essentiel à l’acte de construire et au progrès technique. Nécessité également pour réussir les défis du logement.

A remettre en perspective cependant :

Le béton n’est pourtant responsable que d’1/3 environ de l’empreinte CO2 d’un bâtiment et il va être possible d’abaisser ces niveaux (nous y travaillons avec la filière).

Reprendre les fondamentaux du béton (résistance, endurance …), ouvrages d’arts rendues possibles et utiles à la collectivité.

Ciments et bétons à plus faibles empreintes carbone, comment ça marche ?

Le poids carbone du béton est corrélé au poids carbone du ciment. Produire un béton moins chargé en CO2 revient de fait à travailler sa formulation à l’aide de ciments moins riches en clinker (principale source de CO2 du ciment). Nous travaillons tous les jours avec nos clients (BPE et Prefa) notamment pour les accompagner dans cette évolution nécessaire.

C’est un exercice complexe car il faut trouver les bonnes formulations avec les empreintes les plus réduites vs contraintes des industriels. Mais nous y parvenons.

Tous les leviers sont activés pour diminuer l’empreinte carbone du béton :

  • Travail sur des ciments à ajouts (ciments ternaires) à teneur en clinker moins élevé.
  • Travail sur le process de production (combustibles alternatifs / projet de captage de CO2)
  • Travail sur des constituants nouveaux (confidentiel) 
  • Dynamique industrielle France

Côté granulat :

  • Intégration de granulats recyclés (économie circulaire)
  • Projet Circo2 (carbonatation des granulats)
  • Projet à moyen terme plus confidentiel via les technologies de CCU/CCS

L’ensemble de ces leviers d’actions nous permettent d’être en phase avec la feuille de route de décarbonation de notre groupe HeidelbergMaterial/HeidelbergCement. A savoir la réduction de 30% de nos émission CO2 en 2025 et tendre vers la neutralité carbone à 2050.

Selon vous, quelles réponses communautaires sont nécessaires pour améliorer le process général de construction sur le plan écologique ?

En amont, la conception même du bâtiment doit être pensée de façon à avoir l’empreinte environnementale la plus efficiente possible :

  • Orientation du bâtiment
  • Exploitation du bâtiment
  • Réversibilité et déconstruction
  • Optimiser l’utilisation et la mise en place des matériaux constitutifs du bâtiment (« le bon béton au bon endroit » étendu au « bon matériaux au bon endroit » permettant de laisser la place à une mixité de solutions constructives).
  • Limiter la surperformance et réduire les épaisseurs de voiles béton
  • Travail collaboratif de concertation entre les parties prenantes du projet (architectes/BE/Industriel). C’est l’ensemble du bâtiment qui doit être moins carboné
  • Une seule filière de pourra pas répondre seule aux enjeux.
  • Les efforts doivent être partagés à tous les niveaux de la chaîne (GO + 2nd Œuvre) - Il faut croiser les chaines de valeur.
  • Capter les granulats de béton de déconstruction pour les recarbonater (projet Circo2)
  • Replacer le béton dans son rôle historique : fondamentaux du béton : robustesse, maitrise, coût, inertie thermique, disponible partout et localement, résistance au feu...

Point de vigilance à apporter : Ne pas faire de raccourci entre empreinte environnementale et carbone !

Quand nous parlons de « construction durable », le carbone fait bien entendu partie de l’équation mais il faut également regarder l’analyse de cycle de vie des produits dans leur globalité. Il peut très bien exister des solutions qui apportent satisfaction sur le plan carbone mais qui en contre partie peuvent d’avérer beaucoup plus polluantes, gourmandes en ressources, ou produisant beaucoup plus de déchets. C’est un juste équilibre à trouver et la construction durable que l’on souhaite tous, ne peut être regardée qu’au travers du prisme du CO2.

 

La mixité des matériaux est-elle donc une réponse au mieux construire ? Si oui, quels sont les freins qui persistent quant à son utilisation ?

Réaliser des bâtiments plus frugaux doit passer en premier lieu par l’optimisation de l’utilisation et de la mise en œuvre de matériaux constitutifs du bâtiment. « le bon béton au bon endroit » peut être étendu au « bon matériaux au bon endroit ».

Les freins qui peuvent survenir :

  • Manques d’expertise/d’expérience sur l’emploi et la mise en œuvre de certains matériaux (modes constructifs mixtes encore peu démocratisés à ce jour)
  • Sourcing/approvisionnement de certains matériaux ou constituants
  • Coûts supérieurs à des solutions traditionnelles

->La notion de mieux construire peut également être étendu à la notion de construire plus responsable en utilisant des ressources locales issues des territoires (le béton en fait partie).

Justement, vous évoquez le caractère local/territorial des matériaux, quel est le rôle social, économique et local, des cimenteries françaises ?

  • Une cimenterie génère un ancrage local et territorial fort.
  • Son activité (fabrication de ciment) adossée à une carrière rend l’ensemble du dispositif très difficilement délocalisable.
  • Valorisation du territoire
  • L'emploi local

En France l’activité cimentière génère 4 500 emplois directs (source SFIC)

  • En amont : nous estimons à 25 000 le nombre d’emplois indirects et locaux (sous-traitance et fournisseurs) (source SFIC)
  • En aval : nous estimons à 510 000 le nombres d’emplois indirects liés à la production et à la mise en œuvre du béton. (Source SFIC) soit 1,8% de l’emploi français

La valorisation des déchets

L’activité cimentière permet également la valorisation de 1,8 millions de tonnes de déchets (pneus, huiles et solvants usagées, eaux polluées, farines animales, semences impropres). Ce qui en fait également un acteur important et utile en matière d’économie circulaire.

C’est 1,8 millions de tonnes sont autant d’énergie fossile économisée. (source : SFIC) + impact sur les émissions CO2.

Élargissement et soutien de la zone de chalandises & Multiplication des commerces de proximité

Le ciment voyage très peu autour d’une cimenterie (pas plus de 250 km) ce qui en fait un produit fabriqué localement et valorisé localement. Autour de la cimenterie s’est alors constitué maillage économique d’acteurs locaux (bétonniers, préfabricants, formulateurs, distributeurs de matériaux) qui à leurs tours vont permettre de créer de la valeur sur le territoire.

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